Les femmes commerçantes exerçant le petit commerce transfrontalier entre le Rwanda et la République démocratique du Congo sont confrontées à un surplus des difficultés spécifiques depuis le début de la COVID-19 et la guerre opposant les forces armées congolaises (FARDC) aux rebelles du M23 accusés d’être soutenus par le Rwanda.
À la petite barrière, plusieurs femmes disposant des petits fonds de commerce recourent à ce poste frontalier pour s’approvisionner en vivre et non vivre dans l’un de deux pays. En cette matinée de lundi, nous décidons de partir à la rencontre de ces femmes qui font la navette entre ces deux pays aux relations diplomatiques tumultueuses. Devant nous, une dizaine des mamans commerçantes communément appelées « Chora chora » font la queue à la petite barrière.
Ici, plusieurs services s’activent pour faire le contrôle à la douane. Dans un contexte de tension entre les deux voisins, faire les affaires n’est pas une mince affaire, témoigne cette Congolaise : « Chaque jour, je me réveille très tôt le matin pour être ici à 6h, je n’ai pas des marchandises fixes actuellement, car je suis déçu. Je suis sur le point d’abandonner ce travail. Il n’y a pas de bénéfices malgré tant de risques. Aujourd’hui, pour traverser la frontière, les services migratoires nous demandent une CEPGL qui dispose d’une durée déterminée » se lamente Mwavita RUKUYENGE.
Au-delà des formalités administratives, d’autres femmes dénoncent les tracasseries auxquelles elles font face, surtout de la part des services migratoires congolais. « Il peut s’agir de quelques œufs ou d’un régime de bananes (imaginez la quantité d’œufs récupérés en fin de journée, chaque fois qu’un commerçant passe…). Celles qui résistent subissent des menaces verbales ou physiques, en se voyant imposer par exemple une fouille corporelle humiliante par des hommes » explique Mwavita.
Odette, une autre jeune femme âgée de 30 ans en pagne d’un tin noir, fait également le commerce transfrontalier depuis 2010. Celle-ci vendait de la farine de manioc et les pommes de terre. Depuis la COVID-19 et la reprise des combats entre les FARDC et M23, les deux évènements ont rendu son travail difficile comparativement aux bénéfices tirés accumulés peu avant ces évènements. « Les risques sont nombreux ces derniers temps. Au Rwanda, les taxes sont formelles, mais ici chez nous, c’est l’anarchie totale. Je préfèrerais passer au niveau de Makoro, mais aujourd’hui cela comporte des dangers vus que le Rwanda y a renforcé son dispositif sécuritaire. Avec le commerce des vêtements, il y a trop d’argent et beaucoup de risques. Une fois attrapée, les marchandises sont confisquées et on te met en prison. La peine requise varie entre 3 et 6 mois, voire 1 an. Faire traverser d’habits de seconde main relève d’un courage exceptionnel malgré l’amour des Rwandais pour ces friperies » raconte Maman Odette, commerçante à la petite barrière.
La COVID-19 et la guerre entre le M23 et FARDC un virus sur l’économie transfrontalier « Avant chaque femme commerçante pouvait traverser avec un jeton qui était gratuit. Sur ce document était écrit le nommais actuellement, elles sont obligées d’acheter un document migratoire dont le prix varie entre 5$ pour trois jours et 14$ ou 15$ pour CEPGL qui a une durée considérable. Le deuxième changement est l’heure de la fermeture de la frontière. Avant, on fermait la frontière de la petite barrière à 18h et celle de grande barrière à 20h, mais pour le moment toutes ces deux frontières sont fermées à 15h, une chose qui n’est facile pour ces mamans qui font les petits commerces transfrontaliers » s’inquiète Pépé MIKWA, charge de communication du projet de facilitation de commerce dans le grand lac PFCGL.
« Une femme commerçante qui pouvait rester dans un pays pour continuer à vendre ses produits jusqu’à 17h 45 minutes ou jusqu’à 19h pour traverser à 20h ne peut plus se le permettre. Donc il y a quand même un manque à gagner départ et d’autres parce que la frontière est fermée plus tôt qu’avant (15h). Au niveau du projet de facilitation de commerce, à l’époque, au moment de la COVID-19, nous avons vu en place le système d’achat groupé des marchandises. C’est-à-dire, même si tous les commerçants ne traversent pas la frontière, chaque association pouvait déléguer un membre qui pouvait aller dans l’un ou l’autre pays acheter la marchandise, mettre dans un véhicule puis revenir dans son association avec les produits. Au marché de Kahembe par exemple et les membres de l’association pouvaient se dispatcher la marchandise, chacun selon sa mise » explique Pépé MIKWA.
Le commerce transfrontalier entre le Rwanda et le Congo permet de solidariser et de raffermir les liens entre les peuples en contribuant à l’amélioration des moyens de subsistance et la réduction des risques liés aux conflits, pensent certains chercheurs de la région.
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