Des cas de justice populaire se multiplient dans le groupement d’Irhambi Katana, dans le territoire de Kabare, au Sud-Kivu. Selon la société civile de cette entité, depuis le début de ce mois de mars, environ cinq maisons ont été incendiées et une dame d’une soixantaine d’années a été tuée par des habitants en colère. Le président de cette structure indique que trop souvent, les populations commettent ces actes car elles soupçonnent les victimes de pratiques mystiques.
« Le 13 mars 2024, dans le sous-village de Ngoma, village de Kabamba, deux maisons ont été brûlées et détruites par la population en colère après la noyade d’un jeune garçon d’environ 22 ans sur le lac Kivu. Ce drame a semé la panique au sein de la communauté jusqu’à ce que le voisin de la victime, répondant au nom de Muhindo, soit attaqué car il était pointé du doigt comme l’auteur de cette tragédie. Monsieur Muhindo a perdu des biens de valeur et a échappé de justesse grâce à l’intervention des autorités locales. Le mardi 19 mars 2024, deux maisons ont été incendiées et des champs de cannes à sucre dévastés par des jeunes en colère dans le sous-village de Kalangane, village de Kabushwa, après la mort d’un jeune motard de ce milieu. Ces jeunes en colère accusaient la grand-mère du défunt d’avoir causé la mort de son petit-fils. Cette vieille femme a échappé de justesse suite à l’intervention du chef de village de Kabushwa et d’autres leaders du milieu qui sont intervenus. Le mardi 26 mars 2024, une vieille femme a été tuée par la population en colère dans le sous-village d’Ihimbi, village de Kadjucu. Cette vieille femme est accusée de sorcellerie par la population de ce sous-village, ce qui lui a coûté la vie », détaille Emery Murula.
Alors que les cas de justice populaire continuent de se multiplier, la société civile d’Irhambi Katana condamne fortement ces actes qui sont répréhensibles aux yeux de la justice congolaise. Elle demande à la population d’Irhambi Katana d’éviter ces pratiques qui ternissent l’image du groupement et divisent actuellement plusieurs familles dans différents villages. Elle plaide également en faveur de la mise en place d’un programme de sensibilisation des communautés pour remédier à ce problème.
« Nous exhortons les acteurs sociaux, les notables et les confessions religieuses à intensifier les sensibilisations dans les églises, les réunions et les forums du quartier pour éradiquer ce mal qui gangrène actuellement notre société »,
Les autorités sont également appelées à renforcer les dispositifs de sécurité en ajoutant des éléments de la police dans les sous-commissariats, car l’effectif actuel ne correspond pas à la population locale. Le groupement d’Irhambi Katana dispose d’un nombre très réduit de policiers, ce qui fait que la population déborde à chaque fois qu’il y a trouble car elle n’est ni maîtrisée ni encadrée », poursuit cet activiste.
Avec un regard lucide, Mycole Munyampeta rappelle à la population de Katana que la vie humaine est sacrée. Aucune frustration ne peut justifier le fait d’ôter la vie à quelqu’un.
« Nous déplorons tout ce qui se passe dans cette entité. La justice populaire n’a jamais été une solution au problème. Il est important de distinguer le mal du malfaiteur. J’encourage la population à traduire le criminel devant les instances habilitées pour qu’il réponde de ses actes. Nous devons éviter de perpétuer le cycle de violences dans notre milieu sous le coup de la colère », rappelle-t-il.
Les cas de justice populaire sont légion dans la partie Est de la RDC. Pas plus tard que le mardi 26 mars 2024, un jeune de 20 ans a été tué au village Ngangi 1, dans le groupement Munigi, dans le territoire de Nyiragongo, au Nord-Kivu. Les auteurs de ces actes pointent du doigt le dysfonctionnement de la justice comme base de leur colère pour commettre ces actes. Pendant ce temps, de nombreux défenseurs des droits de l’homme craignent que cette tendance ne continue de croître en cette période où la RDC vient de suspendre le moratoire sur la peine de mort. L’application de la peine de mort risque de faire de nombreuses victimes innocentes, a prévenu l’ONG Credho dans un communiqué publié il y a une semaine suite au rétablissement de la peine de mort sous certaines conditions en RDC.
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