La commémoration du génocide rwandais de 1994, il y a trente ans jour pour jour, révèle une triste réalité : la région des Grands Lacs africains demeure instable. Les coordinations urbaines de la Société Civile – Forces Vives de Goma et de Bukavu, dans les provinces du Nord et du Sud Kivu, expriment leur profond regret devant l’inaction de la communauté internationale quant aux leçons à tirer de cet événement tragique en termes de causes, de précurseurs et de conséquences actuelles.
Malgré les souvenirs douloureux de l’horreur vécue au Rwanda, la stabilité demeure un mirage dans la région. Avec le soutien tacite de l’Occident, notamment des États-Unis, du Royaume-Uni et des États membres de l’Union européenne, le pouvoir de Kigali semble continuer son expansion, participant ainsi au massacre des Congolais dans l’Est de la RDC.
Dans un communiqué de presse conjoint signé par les deux structures, les coordinations urbaines de la Société Civile regrettent vivement cette complicité qui permet au génocide de se poursuivre sans entrave, laissant un lourd tribut de plus de 10 millions de vies perdues dans l’Est de la RDC.
« Les coordinations urbaines de la Société Civile Forces Vives de Goma et de Bukavu déplorent la complicité avec laquelle ce génocide se poursuit sans aucune mesure pour arrêter l’hémorragie qui a déjà détruit plus de 10 millions d’âmes dans l’Est de la RDC. L’intangibilité des frontières étant garantie, certains se demandent à quoi servent les institutions internationales et les instruments internationaux censés réguler le monde. Les membres permanents du Conseil de Sécurité et les États-Unis, qui s’estiment gardiens du monde, devraient activer des mécanismes pour contraindre le Rwanda à mettre fin à la guerre qu’elle impose dans l’Est de la RD Congo« , peut-on lire dans ce document portant la signature d’Alain Shindano et de Mario Ngavho, respectivement présidents de ces structures.
Ces organisations poursuivent et préviennent le monde entier sur les conséquences de la guerre que le Rwanda mène dans l’est du Congo.
« L’agression rwandaise au Congo perdure, et nous espérons que la même Communauté Internationale ne se réunira pas dans quelques années pour célébrer les atrocités au Congo, tout comme elle le fait actuellement à Kigali, célébrant les atrocités qu’elle a orchestrées ou laissées se produire au Rwanda en 1994« , déclarent-ils.
« Profitant du récent séjour au Kivu de Madame l’Ambassadeur des États-Unis, en visite aux gorilles du Kivu, nous lui lançons un appel avec véhémence : Le Kivu n’est pas un parc d’animaux sauvages. L’Est de la RDC n’est pas une réserve de biodiversité destinée au tourisme alors que ses habitants pleurent leurs morts », conclut le document.
Depuis deux ans, les rebelles du M23 mènent une guerre contre les forces armées de la RDC. Partis de Sabyinyo, ces terroristes, appuyés militairement par le Rwanda et ses alliés, ont conquis plusieurs entités situées dans les territoires de Rutshuru, Masisi et Nyiragongo. Cette campagne belliqueuse a entraîné le déplacement de plus de 600 000 habitants. La plupart des déplacés, venant de Masisi et de Rutshuru, vivent dans des camps autour de Goma, dans des conditions infra humaines. Pendant ce temps, plusieurs organisations de défense des droits de l’homme ne cessent de dénoncer les massacres de civils commis par les M23 dans les zones occupées.
Les dernières statistiques font état du massacre de 28 civils entre le 4 mars 2024 et le 1er avril 2024 dans les villages autour de Nyanzale, dans la chefferie de Bwito, à Rutshuru. Aime Mbusa Mukanda, un notable de la zone, a attribué ce crime à Paul Kagame et à son collaborateur Corneille Nangaa, patron des rebelles du M23. Cette avancée des rebelles du M23 se poursuit alors que les forces onusiennes ne font que se désengager de leurs positions. Le dernier cas en date est l’abandon par les casques bleus indiens de leurs positions de Kiuli et Kimoka, pourtant impliqués dans l’opération Springbok. Ce départ a permis aux terroristes du M23-RDF de récupérer ces zones, a indiqué la mission onusienne dans une note confidentielle consultée par nos confrères de l’Agence France-Presse.