Les déplacés de guerre cantonnés dans le camp de Buhimba, à Goma, se plaignent de la présence de nombreux habitants des quartiers environnants dans le camp. Cette situation les prive de leurs droits.
Rencontrés par Kivumorning Post ce vendredi 6 septembre 2024, ces déplacés affirment n’avoir reçu aucune aide depuis leur arrivée. Ils accusent certains habitants de Goma de percevoir l’aide humanitaire à leur place, en se faisant passer pour des déplacés.
« Depuis le deuxième mois de cette année, je suis ici dans ce camp, et je n’ai rien reçu, même pas un verre de riz. On entend dire que certains déplacés reçoivent de l’aide, mais pas les autres. Nous allons mourir de faim ici, nos enfants souffrent déjà de malnutrition. J’ai envie de rentrer chez moi », a déclaré Aline Aimerance, une déplacée venant de Kahusa, dans le territoire de Masisi.
Pour Furayini Bahati Brigitte, certaines personnes de mauvaise foi corrompent les responsables en versant de l’argent pour être inscrites sur les listes.
« Depuis février, nous sommes dans ce camp, mais je n’ai rien reçu comme aide. Les ONG arrivent ici et ne prennent que quelques noms, parfois 2 à 7 familles par bloc, laissant un grand nombre sans inscription. Les habitants de Goma ont un comportement inadmissible : souvent, nous ne sommes pas enregistrés, mais eux le sont toujours, car ils ont de l’argent pour corrompre les enquêteurs », a-t-elle ajouté.
Elle accuse les chefs de blocs d’inscrire de faux déplacés sur les listes en échange d’argent.
« J’ai fui les mains vides, j’ai tout laissé derrière moi. Ici, c’est la souffrance, avec un risque constant d’être violée en allant chercher du bois. Les habitants de Goma nous compliquent la vie dans ce camp. Certains chefs de bloc arrivent avec des listes remplies par des inconnus, souvent des gens de Goma », a témoigné Alliance Pasi, déplacée en provenance de Rubaya.
De son côté, Amani Mufanzara Fidèle, chef du bloc numéro 71 du camp de Buhimba, précise que les déplacés sont souvent confondus avec les habitants du quartier Lac Vert, et que certaines organisations viennent avec leurs propres listes avant l’identification.
« Si, sur les listes de déplacés, on trouve des habitants de Goma, c’est parce que, premièrement, lors de la fuite, nous étions mélangés avec eux, mais aussi par peur, car plusieurs chefs de bloc ont été blessés par ces faux déplacés. De plus, certaines organisations arrivent déjà avec leurs listes. J’ai entendu dire que le chef du quartier Lac Vert avait encouragé ses habitants à venir construire leurs cabanes dans le camp, même les enfants de la rue. Ces habitants de Goma pensent qu’ils ont le droit d’être dans le camp », explique-t-il.
Face à cette situation, ce chef de bloc appelle les ONG et le gouvernement à la vigilance lors de l’enregistrement des déplacés dans le camp de Buhimba.
« Je recommande au gouvernement et aux ONG de procéder avec une grande vigilance lors de l’identification des déplacés, pour distinguer les vrais déplacés, ou de suivre l’exemple de la Croix-Rouge en mettant en place une vérification stricte », recommande-t-il.
Théodore Mbeni Kiketi, secrétaire du site des déplacés de Buhimba, nie la présence d’habitants de Goma dans le camp, mais reconnaît que le niveau d’assistance est très faible.
« Jusqu’à présent, nous sommes tous des déplacés venant de divers endroits, principalement du territoire de Masisi et de Rutshuru. Ceux de Sake ne connaissent pas ceux de Kitchanga, et ainsi de suite. Nous ne nous sommes rencontrés que sur ce site. Cette question d’étrangers dans le camp ne nous concerne pas, car nous ne savons pas vraiment », précise-t-il.
Il souligne également que « le niveau d’assistance est très bas ici. On ne peut pas parler de détournement sans preuves. Ce que je sais, c’est que seul le PAM nous fournit de la nourriture, et qu’ils supervisent les activités du début à la fin. Par exemple, le PAM assiste un nombre limité de personnes parmi la grande population du camp de Buhimba ».
Il lance un appel au gouvernement provincial et national pour qu’ils prêtent attention à cette population en difficulté et prennent les mesures nécessaires afin d’éviter le pire.